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Politiques : un TGV Est Européen lent

WEBTRAINS.NET - REDACTION FRANCOPHONE
15/03/2007 à 07 HEURES 30

Au jour de l’inauguration de la LGV à Pont à Mousson, le 15 mars 2007, il est bon de faire un flash back sur l’histoire encore inachevée du TGV Est Européen. Rarement, le contraste aura été aussi fort entre le désir d’inaugurer un projet qui n’est pas encore terminé et la faible implication de l’actuelle majorité pour le développer.

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En 1995, à l'occasion de la précédente présidentielle à Brumath dans le Bas-Rhin, J Chirac s'exclamait à propos du financement du TGV : « il manque encore trois milliards, on les trouvera ! » Il ne les a pas trouvés : c'est Jean Claude Gayssot, ministre des transports de Lionel Jospin qui les trouvera. Cette anecdote à 9 zéros avant la virgule caractérise la saga de ce dossier qui avait pourtant bien débuté.

Dans la deuxième partie des années soixante dix, le TGV Est est inscrit en priorité n° 2 après le TGV Paris Lyon. Mais, à l'époque, si la logique d'aménagement du territoire commande de désenclaver le Grand Est, la SNCF est confrontée à une dette abyssale. Réaliser une ligne nouvelle sur près de cinq cents km l'effraie. En 1979, le directeur des projets de la SNCF convainc D Hoeffel, ministre des transports et président du conseil général du Bas-Rhin de rétrograder le projet au bénéfice du TGV Atlantique. Pour se justifier, l'intéressé déclare aux Dernières Nouvelles d'Alsace : « l'Alsace n'a pas besoin de TGV ».

Si au milieu des années quatre vingt, un autre ministre alsacien, A Zeller revient sur le projet, la SNCF publie un rapport (Ratier) dont l'argumentaire sera promis à une vaste postérité. Le TGV Paris Strasbourg serait trop cher et pas rentable. A regarder ce rapport de près, on reste confondu. La SNCF n'avait pris en compte ni la connexion avec le réseau allemand, ni la réalisation de l'axe à grande vitesse Lyon / Mulhouse / Strasbourg.

C'est C Trautmann qui, en 1989 relance le projet et obtient une nouvelle étude qui aboutit à un taux de rentabilité de plus de 8 % (à comparer avec le taux de l'étude du Paris / Lyon, 9,6). Elle plaide auprès de F Mitterrand la nécessité de réaliser une « dorsale européenne d'aménagement du territoire », Paris, Strasbourg, Munich, Budapest à un moment où le mur de Berlin vient à peine de tomber. C'est elle encore qui propose la dénomination TGV Est Européen. Enfin, elle suggère de lier ce projet à celui de la réalisation à Strasbourg d'un hémicycle pour le Parlement Européen.

La direction des projets de la SNCF continue de marquer son opposition à un projet qui lui paraît par son ampleur grever la capacité d'investissement de l'entreprise. La direction des transports terrestres au ministère des transports est hostile. Penser l'aménagement du territoire à l'échelle européenne n'est pas dans sa culture. Bercy est farouchement opposé ainsi que plusieurs premiers ministres dont M Rocard.

C'est finalement, F Mitterrand en personne qui demande à P Beregovoy d'engager l'Etat en lançant, en décembre 1992, la procédure d'utilité publique.

Dans la foulée, à l'occasion du sommet franco allemand de Nantes, F Mitterrand et H Kohl concluront un accord pour la traversée du Rhin par le TGV à hauteur de Strasbourg, accord qui a eu valeur de préalable pour l'interconnexion des réseaux grande vitesse français et allemands pour la circulation des ICE sur le réseau français.

Toutefois, le projet butera sur plusieurs écueils. Dès 1993, la droite revenue au pouvoir sera incapable de boucler le financement du projet. Le 15 janvier 1993, au premier comité de pilotage du dossier TGV Est Européen, celui qui allait devenir le directeur de cabinet du ministre des finances de Balladur s'exclamait à propos de la contribution de l'Etat : « pas un Franc de plus ! ».

Politicien, A Zeller proposera, sûr de la rivalité traditionnelle entre Strasbourg et Mulhouse : « Deux TGV, sinon rien » en laissant entendre que la Région Alsace ne s'engagerait pas si l'Etat ne lançait pas le dossier du TGV Lyon / Mulhouse (qui était loin d'être abouti). Cette posture de la Région Alsace a déterminé Bercy à exiger « le phasage » du projet TGV Est Européen au motif que l'Etat ne pouvait pas financer deux TGV en même temps. En fait, les deux projets n'ont jamais eu le même degré de maturité et l'exigence d'A Zeller a contribué à ce que le 15 mars 2007 ne soit inauguré qu'un demi TGV sans aucune certitude pour la réalisation de la seconde phase.

Malgré les discours politiques, la deuxième phase bute sur le rapport du Conseil des Ponts et Chaussées commandé par JP Raffarin. Cette institution a donné un avis négatif à la réalisation de la deuxième phase. Il s'en suit qu'un TGV (LGV) Paris / Francfort est à l'heure actuelle plus probable qu'un Paris / Strasbourg. En tout état de cause, si la deuxième phase devait ne pas se réaliser, c'est non seulement le maillage de la grande vitesse qui connaîtrait un shunt sur l'axe Paris / Strasbourg, mais également celui du développement du fret ferroviaire dont le ferroutage et celui du trafic interrégional. Entre Reding et Strasbourg, le TGV Est Européen partagera avec les autres trafics (marchandises et voyageurs) une ligne calibrée à 70 km / h dans la traversée des Vosges. Il convient de noter que la ligne Strasbourg / Schirmeck / Saint Dié qui pourrait être en partie utilisée pour le fret n'est toujours pas électrifiée ; c'est un autre chaînon manquant en direction du sillon ferroviaire lorrain nord / sud.

Le 15 mars 2007 restera dans l'histoire comme un jour de congratulations et, sans doute, comme le seul jour de son histoire, où le dossier TGV Est Européen aura pris de l'avance sur le calendrier pour motif d'élections présidentielles. Toutefois, dans trois mois, date à laquelle le TGV roulera effectivement, la grande vitesse arrivera à vitesse lente à Strasbourg et en Alsace. Pour le premier TGV financé en partie par les collectivités locales, c'est un succès qui mérite d'être relativisé.

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