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Interview : Chemins de Faire

WEBTRAINS.NET - REDACTION FRANCOPHONE
18/06/2007 à 10 HEURES 00

Web Trains a interviewé Florence Coudert et Pascal Rabot, qui ont réalisé le livre "Chemins de Faire, le savoir cheminot". Une rencontre au coeur du monde cheminot.

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Le site Chemins de Faire

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David Herrgott : Pourquoi éprouvez-vous le besoin de rendre hommage aux cheminots ?

Florence Coudert : Nous avions listé un grand nombre d'ouvrages qui traitaient essentiellement du train en tant que machine. Les performances techniques, économiques, financières étaient développées, expliquées démontrées. Peu de commentaires sur le cheminot qui nous semblait être un des chaînons essentiels. De plus, nous avions enquêté auprès du grand public sur la définition du terme cheminot sur le plan professionnel. Très surpris des réponses restrictives dues certainement à une méconnaissance, les métiers cités se limitant à conducteur de train et contrôleur, nous avons décidé de mettre à jour les professions et savoir-faire de ces 2000 cheminots en Limousin ! La diversité et la spécificité rencontrées ont conforté notre idée de projet éditorial sur les hommes et leurs métiers. A travers le Limousin, nous rendions hommage aussi à l'ensemble des cheminots sur le territoire français. Au gré des échanges, des interviews, des visites sur sites, nous savions que nous avions fait le choix qui correspondait à notre objectif de départ. .

DH : Vous avez choisi la direction de Limoges, sans doute par proximité géographique. Quels signes locaux vous ont marqués ?

FC : Nous vivons au cœur d'une région marquée par la présence du chemin de fer, plus de 2000 employés. De surcroît, le chemin de fer a permis de relier économiquement et socialement le Limousin au reste du pays. Il est vrai que pour des raisons pratiques et d'autorisations nécessaires, il nous était plus facile de choisir la Direction SNCF de Limoges.
Parallèlement nous avions appris que cette région SNCF comportait deux sites uniques en France et il nous semblait obligatoire d'en parler et de présenter aussi les métiers spécifiques qui y étaient rattachés. L'un se situe dans le Lot et est réservé principalement au traitement des traverses en bois par la créosote. J'ai aimé traiter ce chapitre pourtant très technique mais la transmission des explications s'est faite d'une manière intelligente, précise et claire. L'accueil qui m'a été réservé lors de ma visite a été chaleureux et source d'informations. Aucune impatience de la part des cheminots qui étaient plutôt heureux de l'intérêt porté à leur travail. L'autre site est situé aux alentours de la gare de Brive la Gaillarde et abrite le bureau d'études pour la conception et fabrication des draisines, porte-outils de maintenance…
J'ai été séduite par le travail de l'équipe caténaires qui m'ont offert de leur temps personnel pour la rédaction de ce chapitre. Ces hommes font souvent un travail d'équilibristes et les normes de sécurité sont très rigoureuses.
Le chapitre qui m'a intriguée et m'a donné le plus de souci est celui de la soudure par aluminothermie. Je ne pouvais pas aller sur les sites, j'ai donc du lire des ouvrages sur cette particularité, m'entretenir avec le soudeur par téléphone ou internet. J'ai beaucoup observé les photos de Pascal Rabot qui par leur témoignage m'ont aidé dans la rédaction.
Et toujours une joie et une dignité de la part de nos cheminots artisans ou artistes.

DH : Vos photographies témoignent d'une région historique du chemin de fer, loin de la technologie des Lignes à Grande Vitesse. Est-ce une touche d'authenticité pour se rapprocher du monde cheminot ?

Pascal Rabot : Les photographies ne témoignent pas seulement d'une région historique mais avant tout des hommes et de leurs métiers à notre époque puisque l'ouvrage a été réalisé en 2005. L'authenticité est primordiale pour notre travail en général. Pas de discours social ou politique de notre part ; le propos n'était pas là. Plutôt une curiosité sincère face à un patrimoine culturel, artisanal et humain. Nous avons mis au jour un vivier de savoir-faire insoupçonné par le plus grand nombre, moi y compris. Que ce livre devienne dans les années à venir une mémoire, serait la plus belle des récompenses pour les cheminots.

DH : Vous semblez vous être immergé dans les locaux de la SNCF à travers vos récits photographiques. Comment avez vous vécu cette proximité avec les cheminots ?

« Erich Lancaster, chamane de la Nation Tuscaroras d'Amérique du Nord, avec qui j'ai eu l'occasion de discuter me confiait : « Il faut être fier de ce que tu fais et de ce que tu est «
Sans orgueil ni arrogance, tout simplement le sentiment de réaliser quelque chose de bien.
J'ai rencontré en réalisant les photographies de ce livre des gens fiers et amoureux de leur métier de cheminots.
Des hommes qui ont partagé avec moi leurs connaissances et leur savoir-faire.
Tous ces métiers qui font que le chemin de fer fonctionne et que les voyageurs que nous sommes peuvent prendre le train en toute tranquillité.
Certains verront « Germinal « , d'autres une reconnaissance, un hommage ou bien les trois en même temps.
Pour ma part, ce dont je suis le plus heureux, c'est d'avoir avec mon travail, fait naître sur le visage ou dans les paroles de ces cheminots, l'émotion et la fierté d'être présents dans cet ouvrage.
D'autres aventures humaines nous attendent. Merci à tous »

PR : Ce texte, tiré de notre livre représente bien ce que j'ai vécu pendant cette aventure. Des émotions, un enrichissement culturel et humain formidable.
Pour l'anecdote, un journaliste d'un quotidien local m'a posé une question similaire. Je lui ai donc demandé de lire le texte ci-dessus en guise de réponse. A ma grande surprise il me dit, « Oui mais ça c'est du baratin « . Dans son esprit étriqué, ma réponse était synonyme d'un sentimentalisme de business !
Il n'a certainement jamais vu comme moi l'émotion sur le visage de ces cheminots au moment où ils regardaient les photographies.

DH : Et les cheminots ? Vous semblez avoir réussi à briser toutes les frontières de l'intimité des cheminots.

PR : Quand je rencontre des personnes qui reviennent d'un voyage, d'une visite ou autre promenade et que j'entends dire : « Nous avons vraiment été mal accueillis, nous avons mal mangé ou bien ce n'est pas comme chez nous ! « Hé bien pour commencer (en essayant de garder mon calme) je leur dis que c'est un peu normal, ce n'est pas chez vous. Ensuite je leur demande s'ils ont fait attention à la manière dont « eux » sont arrivés et l'impression qu'ils ont pu donner aux autres, à ceux qui ne sont pas de chez eux. Si le centre d'intérêt se sont eux ou bien les gens qu'ils rencontrent.
Tout ceci pour en venir au fait qu'il n'y avait rien à briser. Les relations qui se sont créées naturellement, étaient d'abord d'homme à homme, avant d'être de photographe à homme. Après ceci je devenais invisible. Ces hommes n'ont pas posé pour moi, c'est moi qui devais me fondre dans le décor sans les gêner. Ils n'étaient pas en représentation mais effectuaient seulement une journée de travail, parfois avec des risques : leurs gestes restaient professionnels et concentrés. Ils m'oubliaient.

DH : Vous avez le ressenti d'avoir transcrit la fierté et l'émotion des cheminots. N'avez vous pas ressenti de crispation et de peur dans un monde cheminot souvent remis en question par la société ?

PR : Quand un projet, un sujet me prend aux tripes, je fais totalement abstraction de ce genre de préjugé, sans bien entendu tomber dans les extrêmes. A la sortie du livre, nous avons entendu quelques remarques ironiques sur les cheminots. Mais en ayant côtoyés pendant plusieurs mois ces hommes, nous pouvions contrer certaines idées reçues du grand public.
De toutes les façons dès que quelque chose est mis en avant, il y a toujours des polémiques et des mécontents.
Absence totale d'amalgame ou d'ambiguïté entre les cheminots et nous. Nous venions témoigner de leurs métiers pour les faire découvrir aux lecteurs. Ils ont compris et ont accepté aussitôt.

Lysiane Bollenbach : Quelles sont vos influences photographiques ? Dans votre ambition de témoigner de cette communauté, votre travail s'apparente à celui d'Atget ?

PR : Je n'ai aucune formation photographique, que se soit école, stage ou autre. J'ai du engranger toutes les choses que j'arrive à traduire dans mes photos au fil du temps. Des influences ? Certainement, pour vous dire lesquelles, je ne sais pas trop. Sûrement les aventuriers, les humanistes, ceux qui aiment leur métier de photographe autant que les sujets qu'ils couchent sur la pellicule.
Ceux qui aiment partager leur passion des gens avec le plus grand nombre et qui le font avec humilité.
Je n'ai aucun sujet de prédilection, c'est en premier lieu l'amour et la passion qui déterminent la qualité de mon travail. Il faut que je sois « dedans » comme on dit.
Et merci pour cette comparaison avec le travail de mémoire d'Atget. Dans un avenir proche plusieurs sites SNCF n'existeront plus, donc des métiers disparaîtront.

LB : Comment arrivez vous à concilier des photographies à la fois descriptives et en même temps artistique, entre l'informatif et l'artistique ?

PR : Venant d'une étudiante en photographie cette question est assez flatteuse. La photographie « dite » de reportage est parfois moins bien considérée que la photographie « dite » artistique.
Si un jour cette différence pouvait s'atténuer, voire disparaître au profit de l'appréciation tout simplement d'une belle image, ce serait bien agréable pour certains photographes.
Pour répondre à la question, je crois qu'il faut en premier lieu être curieux de tout, chercher sans cesse, comme un chien limier. Ensuite pour le côté artistique ce doit être une accumulation d'images au fur et à mesure des années. En fait je n'en sais trop rien…
Si, peut-être un besoin vital plus qu'une simple envie de faire ce métier fabuleux. Je ne parle pas des photographies par elles mêmes, mais des situations qui nous sont données de vivre, ou bien des rencontres extraordinaires qui nous prennent aux tripes. Une espèce de liberté de l'autodidacte. Quand je fais une photo, je ne pense pas artistique ou reportage ; la situation ou l'environnement peut amener à classer une photographie thématiquement par les professionnels, mais ce n'est pas ma démarche première. La photo reportage est parfois artistique, même prise dans des conditions extrêmes. N'étant pas soumis à des contraintes, à des commandes, à un métier de journaliste reporter, mon approche du sujet à photographier est enrichie par une émotion, le plaisir que j'éprouve. Si le sujet est une personne, je perçois son envie ou son appréhension. J'aime avant tout ce que je fais.

DH : Si le projet était à refaire, quelle autre région choisiriez vous ? Pourquoi ?

PR : Aucune idée sur une région précise. Les métiers de la région de Limoges se retrouvent dans les autres régions. Seuls, les deux sites présentaient des spécificités. Je ne connais pas suffisamment les autres régions et peut-être certaines de leurs particularités pour répondre correctement. D'autres professions ont retenu notre attention mais je ne sais pas à ce jour si cela se transformera en projet éditorial.

DH : Comment commander le livre ?

PR : Nous venons de créer avec mon amie Florence notre Maison d'Edition. Les Editions Mines de Rien SARL sont nées la semaine dernière.
Florence s'occupe des recherches, de concevoir la structure des ouvrages et d'en rédiger les textes.
Pour ma part, bien entendu les photographies, la photogravure, les maquettes et les graphismes. Je pars ensuite sur les routes du Limousin rencontrer mes clients (libraires, maisons de presse ou supermarchés).
Depuis donc la semaine passée, nous pouvons proposer ces services aux personnes qui souhaitent réaliser un livre avec photographies, pas de roman dans un premier temps.
En précisant toutefois, que nous n'avons pas la possibilité de financer l'édition. Ce sont ces « services » que nous proposons. Livre conçu et imprimé avec notre imprimeur et éventuellement livré à domicile.

Pour commander le livre « Chemins de Faire – Le savoir Cheminots » contacté nous par courrier ou bien par mail : p.rabot@free.fr. Le livre est envoyé au client à réception du règlement par chèque à l'ordre de :
Florence Coudert
Autoédition
La Brande
19500 Jugeals-Nazareth.
05 55 22 90 44 - 06 10 93 32 43

Le prix de vente public est de 38.00 euros.

Nous restons à votre disposition pour d'autres renseignements.
Cordialement,
Florence Coudert et Pascal Rabot

Interview réalisée par Lysiane Bollenbach, étudiante en Arts Visuels, et David Herrgott, fondateur de Web Trains.

David Herrgott

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